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Grève des femmes : revendiquer le socialisme pour la Journée Internationale des Droits des Femmes

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La Journée Internationale des Droits des Femmes (dénommée auparavant Journée Internationale de la Femme Travailleuse) fut crée par les socialistes pour commémorer la grève des femmes ouvrières dans des usines textiles de 1908. Ces deux aspects du 8 Mars - le mouvement ouvrier et le socialisme - doivent être clamés haut et fort en ces temps de gouvernance Trumpienne ou Macronienne.

Tatiana Cozzarelli, traduit par Nicolas-Marie Santonja.

Qu’est-ce que la Journée Internationale des Droits des Femmes ?

En 1908, des ouvrières du textiles organisèrent une grève massive dans New-York pour protester contre leurs conditions de travail. Elles demandaient un meilleur salaire, le droit de vote et une réduction du temps de travail. La plupart des 15,000 femmes mobilisées étaient des immigrées.

En 1909, le Parti Socialiste Américain proposa une journée pour rendre hommage à la grève des ouvrières du textile. En 1910, Clara Zetkin, une socialiste allemande, proposa lors da Conférence Internationale des Femmes Travailleuses d’organiser une Journée Internationale de la Femme Travailleuse, et sa proposition fut approuvée par les femmes déléguées de 17 pays.
Quelques années plus tard, en 1917, des milliers de femmes russes, travailleuses, et/ou femmes de soldats, descendirent dans la rue le 8 Mars en réclamant la paix et du pain. Cet évènement fut le coup de départ du soulèvement qui renversa le régime tsariste. L’année dernière, nous commémorions le 100e anniversaire de cette révolution de Février.

Cela fait donc 100 ans que la Révolution Russe a eu lieu, dirigée par les bolchéviques, et qui a mis au centre de ses préoccupations les droit des femmes. Les bolchéviques légalisèrent le divorce et l’avortement et projetèrent l’abolition du travail domestique, le travail « invisible » exécuté par les femmes dans le foyer. Ils questionnèrent aussi la structure traditionnelle familiale, idéale pour le capitalisme, mais pas pour une société centrée sur la libération des femmes. Elles et ils croyaient en l‘amour libre et en la fin de la maternité obligatoire pour les femmes. Seulement quelques années après la Révolution Russe, les femmes en Russie avaient plus de droits par la loi que beaucoup de femmes en ont même aujourd’hui. Les bolchéviques aspiraient à bien plus que des droits formels protégés par la loi - ils et elles voulaient créer les conditions matérielles et structurelles de la libération des femmes.

Les révolutions de la première moitié du XXe siècle furent trahies par la gouvernance stalinienne. En conséquence, l’idée de socialisme a été associée à la bureaucratisation stalinienne, qui fut un profond recul sur les nombreuses conquêtes de la Révolution Russe, y compris les droits des femmes. Comme l’écrit Andréa D’Atri (membre du Parti des Travailleurs Socialistes en Argentine – ndt) : « Sous le régime bureaucratique stalinien, les bolchéviques de la génération de la Révolution d’Octobre furent exécutés durant les procès de Moscou, et les membres de l’Opposition de Gauche furent persécutés, sous les accusations d’être des « trotskistes ». Alors qu’ils étaient envoyés en camp de concentrations et assassinés, l’avortement redevint illégal, la prostitution redevint un crime, et l’homosexualité fut à nouveau criminalisée. Cela arriva en même temps que la résurrection des stéréotypes traditionnels liés aux femmes, considérées comme de fragiles créatures appartenant au foyer… » Sous Staline, la commission des Femmes à l’intérieur du Comité Central du Parti Communiste fut dissoute, et dans les années 40, le régime offrait des récompenses pour les femmes selon le nombre d’enfants qu’elles mettaient au monde.

Alors qu’un retour partiel au vieil ordre patriarcal s’effectuait en Russie Soviétique, la Menace Rouge, aux États-Unis, a renforcé les stéréotypes sur le communisme à l’Ouest. Beaucoup de conceptions erronées sont nées autour de l’idée que communisme et stalinisme sont une et même chose, et que, sous le communisme, les femmes n’ont aucun droit ni liberté. Pourtant, les bolchéviques de 1917 dirigés par Lénine et Trotsky avaient une véritable vision révolutionnaire des droits des femmes, une que nous revendiquons.

L’importance de se rappeler cette vision et combattre pour sa réalisation est encore plus évidente depuis que le féminisme des années 60 et 70, porteur d’une potentielle radicalité, a été canalisé sur le terrain des institutions en accord avec les intérêts capitalistes. Le féminisme qui servit d’abord à remettre en question les inégalités structurelles fut transformé en féminisme néolibéral, à l’instar du féminisme défendu par Gloria Steinem, icône féministe ayant soutenu Hillary Clinton.

Une partie du problème est l’idée même que la révolution est perçue comme utopique, alors que la révolution dans l’histoire humaine fut la règle et non pas l’exception. Quand les populations opprimées, aux États-Unis, ont combattu pour leurs droits dans les limites du système capitaliste, ils ont fini par être, comme souvent, co-optés par le Parti Démocratique, tout comme l’ont été, à différents degrés, le Mouvement pour les Droits Civiques des Noirs aux États-Unis, le mouvement féministe ou LGBT. Cela démontre que le réel utopisme est de croire que les Parti Sociaux Démocrates et leurs immenses machines politiques, peuvent être mis au service des opprimés et de la classe ouvrière. Il est donc essentiel pour le mouvement féministe de réaliser que la lutte pour la libération des femmes doit être une lutte révolutionnaire, non seulement contre le sexisme et les discriminations, mais aussi contre le patriarcat capitaliste et toutes les formes d’oppression. Il est nécessaire de créer les bases matérielles pour la libération des femmes - cela ne doit pas seulement être inscrit dans la loi, mais enraciné dans la structure même de la société.

Par le même temps, la génération des surnommés « millenials » (individus nés au début du XXIe siècle ndt) ne partagent pas la peur de leurs parents du mot « socialisme ». Leur soutien massif inattendu à Bernie Sanders durant les élections de 2016 illustre bien cette nouvelle tendance. Signe encourageant, spécifiquement dans le contexte actuel d’une montée de la droite dans le monde - du Brexit en Angelterre, jusqu’à l’offensive de l’extrême-droite au Brésil en passant par l’élection de Trump aux États-Unis. Le moment est donc critique. 101 ans après la Révolution Russe, et après quatre décennies sans révolution et en pleine ère Trumpienne, qui semble avoir encore plus provoqué de mobilisations sociales, notamment parmi les jeunes et les femmes.

En ce moment, avec cette histoire, de quel 8 Mars avons-nous besoin ?

Nous devons porter haut le sens historique de la Journée Internationale des Droits des Femmes, non seulement en ayant des revendications pout la libération des femmes, mais aussi en revendiquant la stratégie socialiste de construire la grève générale.

Lorsque nous appelons à la grève, ce mot doit réellement dire quelque chose. Ce n’est pas qu’une protestation. Cela veut dire arrêter le travail. Mais c’est aussi bien plus qu’une femme quittant individuellement son travail. Cela veut dire s’organiser sur les lieux de travail et les lieux d’étude - pas comme individus, mais auprès de nos collègues de travail. Cela veut dire s’engager dans une lutte politique aux côté de nos collègues pour demander au syndicat d’appeler à la grève.
Les bureaucrates syndicaux qui, par le passé, ont laissé passé attaque sur attaque, sans lutte, n’appellent pas à la grève facilement. C’est pourquoi nous devons construire le rapport de force, aux côtés de nos camarades, contre l’apathie et le conservatisme dans nos syndicats. Une pression suffisante forcera les syndicats à plier ou à être remplacés par une direction depuis la base la plus radicale.
C’est le féminisme néolibéral qui nous demande de nous libérer en tant qu’individu. L’idée de mobilisations individuelles s’est infiltré jusqu’au féminisme anti-capitaliste qui, de manière similaire, ne met pas en avant la stratégie de s’organiser sur les lieux qui nous lient directement à la production capitaliste : les lieux de travail.

Trop de fois, nous allons en manifestations avec nos amis, chantons dans une mer d’étrangers et retournons ensuite chez nous. S’organiser sur nos lieux de travail signifie construire le rapport de force contre le gouvernement ; cela veut dire construire des expériences politiques avec nos collèges de travail, les gens que nous voyons tous les jours. Nous savons que les attaques continueront, et qu’il est donc essentiel de construire le rapport de force politique contre ceux qui contre-attaqueront rapidement, qui discutent politique régulièrement et tendent vers des idées plus radicales. S’organiser sur les lieux de travail veut aussi dire veut dire saboter ce qui est indispensable au fonctionnement du capitalisme : les lieux de production du capital.

Le droit de grève, notre droit fondamental de travailleur-ses, a été gravement endommagé par les États-Unis. À New York, la loi Taylor empêche les employés de la fonction publique de se mettre en grève. De telles lois ont été appliquées aux États-Unis. Le droit fondamental de se mettre en grève, l’outil le plus basique pour résister contre le patronat, nous a été retiré - souvent sans un combat. Nous devons combattre pour récupérer ce droit, et nous devons organiser ce combat parmi la base de nos syndicats.

Socialisme révolutionnaire

Nous devons également nous revendiquer de l’héritage du socialisme révolutionnaire. Pendant la première guerre mondiale, Rosa Luxembourg écrit que le choix était « le socialisme ou la barbarie ». Lors d’une manifestation récente, sur une pancarte était notée le slogan « Socialisme ou Trump », ce qui comporte une grande part de vérité. La misère que le capitalisme amène est claire : la destruction de l’environnement, l’absurdité des inégalités, les bombardements par drone à l’étranger (trois par heure en 2016), les meurtres policiers, et les arrestations à domicile massives.

Certains théoriciens ouvriéristes expliquent que parler des problèmes spécifiques aux femmes dans le mouvement socialiste, divise les rangs de la classe ouvrière. Cependant c’est le sexisme qui fait du mal et divise la classe ouvrière, et avant tout aux femmes travailleuses. Le fait que les femmes, et en particulier les femmes immigrées et racisées, soit payées moins, permet de baisser les salaires de tout le monde. Ce sont les capitalistes et l’Etat qui perpétuent une idéologie sexiste via l’école et les médias - qui appartiennent à une poignée de grands patrons - et structurent la société sur la base de familles nucléaires nécessaires à notre survie même.

Quand la classe ouvrière combat le sexisme, se bat pour les congés parentaux, contre les patrons sexistes, elle se renforce et non s’affaiblit. L’Etat et les patrons sont les premiers à perpétuer la violence patriarcale institutionnalisée, ce seront eux les perdants quand la classe ouvrière se mobilisera pour les droits des femmes.

En ce 8 mars, nous devons nous souvenir de l’histoire de la journée internationale pour le droit des femmes. Nous devons nous rappeler le pouvoir des femmes quand elles se mettent en grève, comme elles le firent en 1908. Nous devons nous rappeler le pouvoir de la classe ouvrière, qui peut renverser les régimes, comme le peuple russe et les bolcheviques l’a fait, suite au soulèvement des femmes, pendant la révolution d’octobre. Après la prise du pouvoir ils ont construit une société qui a accordé aux femmes tous les droits que la société capitaliste nous refusent, et les bases matérielles pour une véritable libération.

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Mis à jour le dimanche 24 mars 2024