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8 mars : féministes et anticapitalistes tant qu’il le faudra !

Crédit Photo : Photothèque Rouge / JMB

Dossier réalisé par la commission nationale intervention féministe

Pour ce 8 mars 2015, les luttes pour les droits des femmes sont toujours autant d’actualité, et de nombreuses initiatives sont prévues partout en France.
À Paris, la division du mouvement féministe autour des questions de l’islamophobie et de la prostitution se retrouve dans la rue, avec deux manifestations distinctes. Le NPA appelle et sera présent aux deux manifestations, et continue à défendre le projet d’un mouvement autonome des femmes réunifié, notamment en favorisant les mobilisations autour des questions consensuelles.
C’est le cas de l’IVG, de la santé, mais aussi du salariat, de la précarité, ou des violences, des thèmes abordés dans ce dossier. Pour autant, dans cette situation, la lutte contre l’islamophobie ne peut être décrochée du mouvement féministe, comme le revendiquent certaines organisations. Au contraire, nous cherchons à construire un féminisme inclusif qui s’adresse à toutes les femmes, dans une perspective lutte de classes et antipatriarcale.
Chloé Moindreau

Loi Macron : vers plus de précarité encore pour les femmes

Déjà les plus précaires du salariat, avec la déréglementation du travail de nuit et du dimanche prévu, les femmes paieront une fois de plus bien cher les régressions sociales portées par le projet de loi Macron. Dès ce 8 mars, l’opposition des femmes contre la loi Macron doit se faire entendre dans la rue.

La précarité au travail, une réalité féminine

Si les femmes ont très largement « intégré le marché du travail », comme le dit le vocable économique, elles sont les premières concernées par le sous-emploi. Ainsi, près d’un tiers d’entre elles travaillent à temps partiel, pour 6,7 % des hommes. Et au total, 83 % des emplois à temps partiel sont occupés par des femmes. Il faut ajouter que les secteurs qui recourent le plus aux temps partiels sont le commerce (32 % des employéEs en CDD) et l’aide à domicile (50 % des personnels en CDD), des secteurs très féminisés !
Les femmes subissent aussi davantage l’emploi en contrat précaire : 12 % des femmes qui travaillent sont en CDD ou en intérim, 9 % des hommes. Et dès le premier emploi, le ton est donné : quel que soit le niveau d’études, les femmes sont plus souvent recrutées en CDD à la sortie du système éducatif. Et plus le niveau d’étude est faible, pire c’est : 48 % des jeunes femmes sans qualification sont recrutées en CDD, 25 % des jeunes hommes dans la même situation.
Ces éléments expliquent, mais pas à eux seuls, les écarts salariaux entre hommes et femmes : tous temps de travail et secteurs confondus, le salaire moyen des femmes est de 24 % inférieur à celui des hommes. Concrètement, si l’on prend le salaire moyen (2 312 euros), cela représente 447 euros par mois. Ces écarts ont des conséquences très concrètes sur les conditions de vie des femmes : elles sont davantage touchées par la pauvreté monétaire, renoncent le plus souvent aux soins, ont plus difficilement accès aux activités sportives et culturelles, etc.

L’attaque frontale de Macron : le travail de nuit et du dimanche

Du fait de la situation des femmes au travail, toute offensive contre les salariéEs a des conséquences amplifiées et spécifiques pour les femmes. De ce point de vue, la mesure de la loi Macron qui inquiète le plus est l’extension et l’assouplissement du travail de nuit et du dimanche. À ce titre, il faut se rappeler que l’« ouverture » du travail de nuit aux femmes en 1992 avait alors été présentée comme une mesure d’égalité... Elle a surtout permis au patronat de multiplier par deux le nombre de salariéEs de nuit !
Or, le travail de nuit a des répercussions très réelles sur la santé de tous les travailleurEs. Une étude de la DARES de 2005 sur l’évolution du travail de nuit et du soir rappelait ainsi que « le travail de nuit a des effets nocifs pour la santé, aussi bien pour les hommes que pour les femmes. Mais comme les femmes ont des charges familiales et extra-professionnelles plus lourdes, leur capacité de récupération entre deux postes est probablement moindre et les difficultés d’organisation familiale plus importantes. » Concernant leur santé, une étude menée par des chercheurs de l’Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale) publiée en 2012 conclut à un risque accru de cancer du sein chez les femmes ayant travaillé de nuit. En innovant dans la régression sociale et en introduisant la notion de travail en « soirée » pour les heures travaillées entre 21 h et 24 h, la loi Macron étend encore plus les possibilités du patronat d’exploiter 24 h/24.

Libre et volontaire ?

Concernant le travail du dimanche, les femmes représentent d’ores et déjà 56 % des salariéEs travaillant ce jour-là. Et le chiffre est encore plus important pour les jeunes femmes entre 15 et 29 ans habitant en zone urbaine sensible (ZUS) : selon les chiffres d’un rapport du Haut conseil à l’égalité, plus d’une sur cinq travaillait régulièrement le dimanche en 2012.
Le gouvernement a beau jeu de reprendre le vocable libéral du volontariat et de la liberté de choix, qui peut sérieusement penser que les salariéEs concernés (commerce, hôtellerie, nettoyage), et qui connaissent déjà le temps partiel et les bas salaires, sont réellement « libres » de choisir de travailler le dimanche ? Et cerise sur le gâteau : le texte de loi ne prévoit aucune contrepartie minimale au travail du dimanche (majoration de salaire et/ou repos), mais renvoie cette question à la négociation locale. La liberté sauce Macron, c’est celle du patronat de rendre plus flexibles encore le travail et nos temps de vie.
Alors ce 8 mars, nous serons dans la rue pour clamer que nos dimanches, nos soirées et nos nuits, nous appartiennent, et lutter pour ce qui permet un réel progrès social pour tous et toutes : l’augmentation des salaires, avec pas salaire inférieur à 1 700 euros et l’égalité salariale ; la transformation des contrats précaires en CDI ; l’interdiction du temps partiel imposé ; la réduction du temps de travail, sans diminution de salaire ni aggravation des conditions de travail.
Abby Taro

Paris 8 : une grève menée par les premières concernées

L’entrée des femmes sur le marché du travail s’est faite à la chaleur des luttes et des besoins capitalistes de main-d’œuvre. Pourtant, tout cela n’a pas remis en cause le travail reproductif effectué gratuitement, ni les rapports de genres au sein du travail...

Vingt-cinq pourcent de différence de salaires, double de journée de travail, plafond de verre, auxquels s’ajoute la discrimination sectorielle, enferment les femmes là où elles incarneraient le mieux les « vertus féminines ». Elles constituent ainsi 73 % des employéEs administratifs de la fonction publique, occupant les échelons les moins reconnus et les contrats les plus précaires, et pire lorsqu’elles sont issues de l’immigration...
Depuis le 19 janvier, le Collectif des bas salaires de l’université Paris 8 se bat pour une augmentation de salaire et de meilleures conditions de travail pour l’ensemble du personnel, titulaire et contractuel (cf. articles dans l’Anticapitaliste n°277, 278 et cette semaine en page 8-9). Majoritaires parmi les grévistes, cette lutte révèle les problématiques liées à leur condition de femmes travailleuses.
Le poids des pressions familiales, de leur invisibilité au travail, des rapports hiérarchiques et genrés, et de l’ensemble des violences qu’elles subissent au sein et à l’extérieur du travail, transparaissent dans les discussions, témoignant de l’articulation entre travail précaire et diverses oppressions subies en tant que femmes, le plus souvent, racisées.

Entre oppressions des femmes et intérêts de classe

Reconnue en tant qu’intellectuelle de « gauche » pour ses travaux sur les mouvements sociaux, Danielle Tartakowsky, présidente de Paris 8, apparaît en contradiction avec l’image qu’elle se donne. Si l’oppression de genre frappe l’ensemble des femmes, les intérêts de classe révèlent le parti pris qui sépare un camp de l’autre au sein des luttes. L’opacité des comptes, les manœuvres et menaces scandaleuses de rétention de salaire, du jamais vu dans cette université fille de 68, ont contribué à faire tomber les masques.
Les grévistes de Paris 8 sont un exemple de lutte contre la casse de l’enseignement supérieur, mais aussi contre l’alliance entre patriarcat et capitalisme. À l’approche du 8 mars, la lutte des grévistes de Paris 8 doit nous rappeler toutes ces femmes dont la détermination, la lutte et parfois la vie, ont été nécessaires aux acquis d’aujourd’hui et au nom de qui nous continuerons à nous battre pour nos victoires de demain.

Marine et Tania (Paris 8)

Avortement, une lutte unitaire et de longue haleine

Ce 8 mars 2015 est l’occasion de rappeler que la lutte pour les droits des femmes est un combat perpétuel. Ce 17 janvier, nous étions plus de 2 000 personnes à Paris en manifestation pour commémorer les 40 ans de la loi Veil, légalisant l’avortement, mais aussi pour réaffirmer ce droit.

Menacé ou interdit encore dans de nombreux pays européens, la France opère aussi un retour en arrière progressif sur ce droit. Le manque de moyens alloués au secteur de la santé touche en effet de plein fouet les femmes : les centres d’IVG manquent de personnel, de places disponibles et consacrent moins de temps à l’accompagnement.

Des économies au détriment du choix

Le 16 janvier dernier, Marisol Touraine, la ministre des Affaires sociales, de la Santé et des Droits des femmes a annoncé le remboursement à 100 % de tous les actes afférents à la bonne réalisation de l’IVG. Une mesure qu’il était temps de mettre en œuvre... mais qui devra attendre l’automne 2015 pour être effective. À noter : le délai de réflexion et la clause de conscience des médecins sont maintenus, empêchant une réelle reconnaissance du droit de choisir pour les femmes.
Depuis dix ans, on constate la fermeture ou risque de fermeture de plus de 200 centres IVG partout en France. Dans ce contexte, la volonté de développer les IVG médicamenteuses s’affirme pour réaliser des économies en diminuant les interventions faites en établissement de santé. Une annonce problématique qui enlève aux femmes le droit de choisir.
Autre fait alarmant, les fermetures effectives ou programmées de nombreux centres du Planning familial (Toulouse, Colombes (92)…), centres qui non seulement permettent un accompagnement des femmes qui avortent mais ont un rôle primordial d’information sur la contraception.

Des perspectives de mobilisation

À l’heure où le Chili entame des démarches pour dépénaliser l’avortement et où l’Espagne recule sur certains points de son projet de loi – qui initialement souhaitait interdire l’avortement, même en cas de malformation du fœtus – le caractère international de cette lutte se rappelle à nous régulièrement.
En France, comme l’année dernière avec la manifestation du 1er février, la mobilisation autour du 17 janvier a permis de montrer que les féministes pouvaient dépasser leurs différends pour s’allier derrière un seul mot d’ordre. Un constat cependant à nuancer au vu des tensions toujours présentes entre le CNDF et le collectif 8 mars pour touTEs (dont fait partie le Strass).
La reconstruction d’un mouvement féministe efficace relève encore aujourd’hui de l’espoir. À nous de faire grandir cette flamme.
Delphine

Défendre les droits des femmes, c’est aussi combattre l’islamophobie

Depuis les événements de janvier, les politiques, discours et agressions islamophobes et racistes se sont renforcées. L’islamophobie n’est pas un fait nouveau en France et elle est souvent utilisée par les gouvernements pour faire accepter leurs politiques impérialistes à l’extérieur de la France et leurs politiques liberticides et inégalitaires à l’intérieur. Cela a des conséquences spécifiques pour les femmes musulmanes, réelles ou supposées, et sur le rapport de forces entre notre classe et la bourgeoisie.

Aucune femme ne peut être libre si son pays est sous le joug de l’impérialisme !
Depuis une quinzaine d’année, les politiques et propagandes islamophobes s’accentuent, en France, et plus largement en Europe et aux États-Unis. La stigmatisation « musulmanEs = terroristes » sert à légitimer les guerres impérialistes sur fond idéologique du « choc des civilisations ». L’État français a récemment mené des guerres impérialistes invoquant la lutte contre le « terrorisme » et la défense des « droits des femmes »...
Pourtant, des femmes maliennes s’étaient opposées à l’intervention française au Mali, dénonçant son caractère impérialiste et sexiste, mais cette prise de position n’a pas été relayée... Les politiques colonialistes et impérialistes de la France n’ont jamais servi les droits des femmes. Au contraire, les interventions de l’armée française se traduisent même souvent par des meurtres et des violences sexistes, dont sexuelles, pour les femmes !
Il ne faut pas perdre de vue que ces interventions n’ont aucune visée émancipatrice. Elles permettent de mettre en place ou de consolider les intérêts de certains groupes capitalistes français et de garder le contrôle sur des matières premières : pétrole, gaz, coltan…
Notre solidarité internationaliste et féministe passe par la dénonciation et le combat contre l’impérialisme français (et tous les autres) et ses fausses prétentions à défendre les droits les femmes. Nous soutenons les luttes des peuples pour l’auto-détermination et contre l’impérialisme. La lutte pour l’émancipation des femmes sera l’œuvre des femmes elles-mêmes !

L’islamophobie : un fléau sexiste et raciste !

Depuis 2004, les lois, circulaires et décrets islamophobes et racistes ont donné un cadre légal à l’islamophobie. Les paroles des femmes visées par ces lois ont été invisibilisées en faveur de discours et de « débats », souvent hostiles, dépossédant les femmes de leurs vies et de leurs choix. De nombreuses femmes se retrouvent réduites à certains aspects de leurs supposées identités en une seule figure – celle de LA musulmane – et réduite autour d’un objet, le voile ! Des discours directement hérités du colonialisme français ont été massivement réinvestis, entre autre par une altérité entre un « eux » désignant de manière homogène les musulmanEs, réels ou supposés, et un « nous » désignant certainEs « françaisEs »...
L’application de ces textes entraîne exclusions des établissements scolaires, interdictions pour des mères d’accompagner les sorties scolaires, licenciements arbitraires, violences et harcèlements policiers, restrictions de la liberté de circulation, etc. L’État a fait de la liberté de culte un privilège, dont les musulmanes sont exclues. Dans ce contexte islamophobe décomplexé, les agressions psychologiques et physique, dont sexuelles (arrachage de voile, insultes, menaces, coups, etc.) n’ont cessé d’augmenter. C’est un climat d’insécurité général, dont économique, qui s’est installé.
Après les événements de janvier, le gouvernement a mis en place un site (« stop djihadisme ») qui fait des femmes mettant « des vêtements qui cachent le corps » des suspectes. Ces politiques islamophobes et sexistes se combinent avec l’imposition d’une « union nationale », qui sert à valider les politiques inégalitaires du gouvernement PS-Medef. Elles servent aussi à entretenir un climat propice pour mettre en place des mesures sécuritaires et une surveillance généralisée, sur l’exemple des lois dites anti­terroristes. Ces politiques sont un fléau pour la majorité de la population en France, musulmane ou non.

Résister à l’islamophobie et au sexisme c’est possible !

Résister, c’est ce que font de nombreuses femmes au quotidien en refusant les injonctions. Résister, c’est aussi ce que font celles qui s’organisent pour lutter contre les exclusions, les licenciements, les lois, décrets et circulaires !
Nous dénonçons les agressions racistes et sexistes, quelles soient le fait de la police, de groupes politiques ou d’individuEs. Nous demandons l’abrogation de toutes les lois islamophobes et racistes, le droit de vote pour les résidentEs et des papiers pour touTEs. Notre combat est résolument féministe, internationaliste, antiraciste et anticapitaliste !
Audre

En Turquie, Özgecan Aslan tuée pour être montée dans un bus
L’assassinat d’Özgecan Aslan, jeune étudiante de 20 ans, violée, mutilée et tuée par un groupe d’hommes dans un bus, a levé un vent d’indignation dans le pays.

Le phénomène des violences faites aux femmes dans la rue et les transports, y est devenu tragiquement banal : tous les jours des femmes se font agresser car elles se déplacent seules ou en « mauvaise compagnie », le plus souvent sous les yeux de passants indifférents voire complices... Avec sa cruauté particulière, ce crime a servi de détonateur à une colère intégrée depuis de longues années.
Dans près de 40 villes turques, des dizaines de milliers de personnes sont descendues à plusieurs reprises dans les rues pour crier leurs colère et leur indignation. Une pétition lancée sur le sujet a recueilli plus de 300 000 signatures en 24 heures. En soutien, des hommes ont également organisé un défilé très médiatisé en jupes, afin de dénoncer ce climat de violence qui détériore la société tout entière.

Gouvernement responsable !
Les associations féministes dénoncent une augmentation du phénomène depuis quelques années (300 femmes tués sur les dix premiers mois de 2014), augmentation liée à une justice laxiste qui ne condamne quasiment jamais les agresseurs, et à un contexte politique de montée des idées réactionnaires de la droite et de l’extrême droite religieuse et conservatrice.
Les manifestantEs dénonçaient la responsabilité du gouvernement et de ses discours discriminatoires : en juillet 2014, le vice-Premier ministre Bülent Arinc invitait la gent féminine à « préserver sa décence (…), ne pas rire fort en public et protéger son honneur ». « Notre religion a défini une place pour les femmes, la maternité », disait le président Erdogan en novembre dernier. Le même avait aussi comparé la contraception à une « trahison » dans un discours prononcé lors d’un mariage fin 2014...
« Nous ne sommes pas en deuil, nous sommes révoltés », scandaient les manifestantEs. Ces manifestations font écho à celles contre le viol en Inde, mais aussi à l’actualité de ces derniers mois dans la région : les militantes du PKK turc et les femmes engagées dans les YPJ syriennes ont rappelé que les femmes peuvent combattre les armes à la main en Turquie et en Irak.
Dans la cadre de la Marche mondiale des femmes et du 8 mars, il est faut rappeler que dans le monde entier, la libre circulation dans l’espace public devrait constituer l’une de nos libertés premières.

Hélène Pierre

Voir en ligne : http://www.npa2009.org/actualite/8-...

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Mis à jour le dimanche 21 avril 2024