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Noël, ou l’avènement du capitalisme

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Tribune libre

Publié le 23 décembre 2016

Ce soir, des familles heureuses célébreront la naissance du Christ en se partageant la dinde et la bûche au chocolat. Les plus riches tartineront leurs toasts de caviar en buvant du champagne, les autres dépenseront le peu d’argent qu’ils possèdent pour se fondre dans le moule. Pendant ce temps, à Alep, on meurt sous les bombes, ici, c’est la police et le froid qui tuent. Le reste de l’année, on nous exploite pour mieux nous faire savourer cette « parenthèse enchantée ».

Léonie Piscator

Voilà plusieurs semaines que les rues des villes se sont parées de lumières, de paillettes et d’étoiles. Toute cette poudre aux yeux pour nous faire oublier l’espace d’une journée ceux qui meurent par milliers au-delà des frontières, sous les bombes envoyées à l’aveugle par les impérialismes qui massacrent à la pelle pour un peu de pétrole, un contrôle relatif sur des terres dévastés et des vies décimées.

Voilà bientôt un mois que dans les rayons de tous les supermarchés sont exposés, clinquants, des jouets par milliers et autres bibelots. Comme si ça suffisait à ne plus se révolter avec tous ceux qui, tous les autres jours de l’année, se tuent au travail pour survivre, pour se payer à la fin du mois de quoi tenir jusqu’au suivant. Comme si on pouvait fermer les yeux devant l’évidente injustice de milliards de personnes qui sont exploitées par une poignée d’autres, qui se roulent avec obscénité dans l’or qu’ils ont volé.

Depuis longtemps déjà, les murs sont couverts d’affiches culpabilisant les parents indignes qui ne peuvent offrir des cadeaux hors de prix à leur progéniture. À la télé, les publicités mesquines voudraient faire croire à ceux qui n’ont pas le goût de rire en ce jour de cynisme international, qu’ils ne sont pas normaux.

Ces derniers jours, les bonnets de Noël couvrent la tête des vendeurs pour nous faire oublier qu’ils sont des milliers à travailler sept jours sur sept afin que les temples de la consommation restent ouverts jusqu’à l’aube.

Les Mères Noël dénudées sont tout de même là pour nous rappeler que le consumérisme est le nouvel opium du peuple, et que le corps des femmes est une marchandise comme les autres. Les guirlandes clignotantes ne parviennent pas non plus à dissimuler les silhouettes de tous ceux qui, victimes de ce système, passeront la nuit dehors. L’injonction à la fête, à l’amour, et au partage n’est qu’une pression de plus pour ceux qui ne sont pas dans le moule, pour ceux qui n’ont pas de quoi se payer une tranche de bonheur en ce 24 décembre. Noël isole les plus démunis et ne réconforte que temporairement ceux qui veulent bien croire à l’illusion et qui se réveilleront, groggy, le portefeuille vide et le ventre plein.

Alors plutôt qu’un joyeux Noël… Que vive la lutte de ceux qui n’appartiennent pas aux familles lisses et sans histoires des publicités, de ceux qui refusent de se conformer, qui triment toute l’année.

En ce jour de célébration du système capitaliste, fêtons les prochaines bagarres victorieuses et celles qui sont passées, solidarisons-nous avec les victimes de la répression, avec les travailleurs en lutte, ici et au-delà des frontières.

A leur fête qui ne parvient pas à masquer l’injustice, les inégalités qui opposent les plus riches à tous les exploités, opposons notre solidarité. Plutôt que de croire au Père Noël, luttons contre la division de notre camp social, contre la précarité et l’exploitation.

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Mis à jour le vendredi 1er novembre 2024