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Aurélie-Anne Thos
Hebdo L’Anticapitaliste - 622 (30/06/2022)
Le 24 juin, la Cour suprême des États-Unis est revenue sur l’arrêt Roe vs Wade garantissant le droit à l’avortement. Depuis, la liste des États interdisant l’IVG ou réduisant drastiquement son accès ne cesse de s’allonger : le Missouri, l’Arkansas, l’Oklahoma, le Kentucky… Certains n’acceptant aucune exception, même en cas de viol, même en cas d’inceste, même en cas de risque vital pour la femme.
Pour les centaines de milliers de femmes concernées dans ces États, la situation est catastrophique : tenter d’accéder à l’avortement dans un État ou pays voisin pourrait les mettre en danger, et pour les femmes précaires, parmi lesquelles nombre de femmes racisées, cela ne sera de toute façon pas une option, le voyage étant trop cher. C’est un retour en arrière terrible en matière de droits humains et d’accès à l’autonomie pour les femmes. Et la Cour suprême pourrait ne pas s’arrêter là : l’accès à la contraception, notamment la contraception d’urgence, et le mariage entre personne du même sexe pourraient aussi être menacés.
Pouvoir planifier sa grossesse, pouvoir choisir de faire des enfants ou non devrait être un droit inaliénable. Ceux qui attaquent ce droit sont des hypocrites car les femmes ont pratiqué, pratiquent et pratiqueront toujours des avortements. Autoriser l’avortement ne fait pas augmenter le nombre d’avortements, interdire l’avortement ne fait pas diminuer le nombre d’avortements. La seul chose qui change lorsque l’on interdit l’avortement, c’est le nombre de femmes qui en meurent. Interdire l’avortement c’est volontairement laisser des femmes mourir. Dans le monde, une femme meurt toutes les neuf minutes d’un avortement clandestin et bientôt des milliers de femmes étatsuniennes se tourneront vers des avortements non sécurisés et ne pourront pas compter sur leur médecin en cas de complications.
Cette situation dramatique nous rappelle à quel point nos droits sont fragiles. Il n’y a pas qu’aux USA : en Pologne, le gouvernement veut dorénavant ficher les femmes enceintes. En Italie, la clause de conscience des médecins entrave fortement l’accès à l’IVG. En France, même en cas de constitutionnalisation du droit à l’IVG il faudra se battre pour y avoir accès de manière réelle : pour l’ouverture de centres et de lits d’IVG, l’allongement des délais légaux, la suppression de la clause de conscience.
Notre solidarité est internationale, nous soutenons toutes les femmes en lutte pour obtenir le droit à disposer librement de leur corps, que ce soit aux USA, en Pologne, à Malte, au Maroc, au Brésil, au Chili… Solidarité avec les femmes du monde entier !